dimanche 2 décembre 2007

Histoires de violence

Eastern promises est un choc. Jamais violence n'a autant impressionné par sa crudité et sa laideur. David Cronenberg poursuit son exploration de la violence contemporaine avec le versant européen d'un diptyque dont A History of violence est le contrepoint américain. Autre point commun entre les deux films : la présence en tête d'affiche de Viggo Mortensen (alias Aragorn) dont la sobriété n'a d'égale que la puissance.
Eastern promises est dur, brut, tranchant. Les scènes de violence provoque des cris et des soupirs d'horreur qui parcourent la salle. Combien de spectatrices se sont mis la main devant les yeux ou blottis dans les bras de leur petit ami devant certaines scènes insoutenables ? La séquence du sauna est d'ailleurs appelée à entrer dans l'histoire du cinéma aux côtés de la séquence de la douche de Psychose, d'Alfred Hitchcock. David Cronenberg montre la nudité du corps tatoué de Viggo agressé par des tueurs tchétchènes qui veulent lui faire la peau. Cette scène prend une place particulière dans l'univers de Cronenberg dans lequel le corps est soit modifié (La Mouche), cloné (Faux semblants) ou virtualisé (eXistenZ).
Et pourtant, le film est un chef d'oeuvre. Aucune complaisance, ni catharsis. Le film retrace l'histoire d'une famille mafieuse russe réfugiée à Londres dont les exactions tiendrait une place de choix dans le catalogue des horreurs commises (viol sur mineurs, égorgements, assassinats sommaires, mutilations et j'en passe et des meilleures) Une sage femme (merveilleuse Naomi Watts) recueille une enfant après la mort en couches de sa mère. Son journal intime rédigé en russe la mène vers le parrain d'une triade russe extrêmement puissante. Derrière une respectabilité de façade, elle découvre un univers gangrené par le pouvoir, la violence et la vice. Vincent Cassel est impeccable dans son registre habituel de voyou expansif, en interprétant le fils du parrain russe. Mais Viggo Mortensen, comme dans A history of violence, est absolument génial en chauffeur et homme de main de la mafia russe. Il incarne littéralement cette violence contenue, mais qui peut éclater à tout moment. Sa maîtrise du russe renforce sa crédibilité.
La violence est certes mise en spectacle, mais la réalité est bien plus agressive. Cronenberg a capté cette âme slave qui s'est construite et s'est nourrie dans le sang. Le conflit en ex-Yougoslavie le prouve et les criminels de guerre serbe (Arkan) et croate (Ante Gotovina) n'ont rien à envier aux bouchers nazis... sauf qu'ils ont commis leurs horribles méfaits au XXème siècle. La Russie du capitalisme sauvage n'est pas en reste. La guerre en Tchétchénie, le dénouement de la prise d'ôtages tragique de l'école maternelle de Beslan, l'assassinat de la journaliste Anna Politovskaïa et l'empoisonnement au polonium 210 de l'ex-agent du KGB Alexandre Litvinenko montre que l'on ne s'embarrasse pas de fioritures pour éliminer ses opposants. Les déclarations de Vladimir Poutine (pas un poète, celui-là) selon lesquelles il ira traquer les terroristes tchétchènes jusque dans les chiottes ne son pas spécialement faites pour apaiser les esprits.
En sortant de la projection de ce film, je me suis promis de ne jamais allé plus à l'est que le XXéme arrondissment de Paris.



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